La MeSoRe nous vient tout droit des États-Unis. Cet acronyme a été inventé dans les années 70 par les deux chercheurs Roger Fisher et William Ury qui enseignaient le droit à Harvard. Connaître sa MESORE vous permet de sortir d’une négociation délicate en étant malgré tout gagnant.
Pourquoi négocier ? Pour les deux chercheurs américains, créateurs de « la négociation raisonnée« , et auteurs de « Comment réussir une négociation », la réponse et simple : « Si nous négocions, c’est pour obtenir un résultat supérieur à celui qu’on pourrait escompter sans négociation. » Qui ne connaît pas sa MeSoRe s’aventure à rencontrer l’échec dans ses futures négociations. Mais venons en aux faits : que signifie ce mystérieux acronyme ?
Ne rien laisser entre les mains du hasard
La MeSoRe signifie votre « MEilleure SOlution de REpli » (en anglais BATNA : Best Alternative To a Negociated Agreement). C’est la solution de repli à privilégier en l’absence d’accord conclu. Connaître sa MeSoRe, c’est savoir ce que vous ferez ou ce qui arrivera si vous ne parvenez pas à un accord. En d’autres termes, c’est anticiper.
Ce concept s’avère particulièrement efficace en particulier quand la partie adverse est plus puissante. » Un négociateur qui possède une MeSoRe est donc plus apte non seulement à déterminer l’accord minimum qu’il peut accepter mais encore à l’obtenir. Rechercher sa MeSoRe est certainement la ligne de conduite la plus efficace qu’il puisse adopter quand il affronte un négociateur apparemment plus puissant ».
Mises en application de la MESORE
Voyons concrètement comment identifier et utiliser sa MeSoRe. Nous verrons que sa MeSoRe peut s’avérer utile dans les situations du quotidien et qu’il faut l’avoir en tête pour ne pas accepter un accord trop vite.
Exemple de négociation avec MeSoRe
La dirigeante d’une agence de voyage négocie avec un client potentiel, Monsieur Chenu, 10 jours de séjours aux Seychelles. Ce n’est pas évident pour elle de savoir quels tarifs elles pourra négocier, ni même si elle parviendra à convaincre Monsieur Chenu d’opter pour cette destination. Ainsi, avant de rencontrer son client, la dirigeante réfléchit à sa meilleure solution de repli. En l’occurrence, sa MeSoRe est de proposer ce séjour à deux autres clientes qu’elle sait fortement intéressées par la destination, afin de faire grimper les enchères et de s’assurer une vente à 3000€.
Il est indispensable de connaître sa MeSoRe avant de débuter une négociation. Autrement, vous ne pourrez pas savoir quand l’accord est acceptable, ni quand vous retirer. Débuter des négociations sans connaître votre MESORE, c’est vous mettre d’emblée en mauvaise posture. Cela peut vous conduire à rejeter une offre alors que celle-ci est plus intéressante que votre solution de repli.
Exemple de négociation sans MeSoRe
Damien a pensé qu’il serait gagnant en acceptant l’offre de dédommagement du garagiste pour un dysfonctionnement sur son véhicule. Il aurait pourtant payé moins cher en allant se renseigner au garage situé à deux kilomètres de son domicile… Damien n’avait pas évalué la somme demandée par le garagiste, ni envisagé de solution de repli en cas d’offre non valable.
Chercher un meilleur accord grâce à votre MeSoRe
Fonctionner ainsi à tâtons, c’est prendre le risque d’accepter une offre moins favorable à ce qui aurait pu être obtenu ailleurs sans accord (« j’ai sans doute d’autres options, mais cet accord me semble intéressant »).
En ayant pris la mesure des choses, c’est-à-dire en anticipant pour évaluer la proposition minimum acceptable, vous ne sortez jamais dupé ou déçu d’une négociation. Connaître sa MeSoRe nécessite de bâtir un plan en amont pour connaître vos possibilités et évaluer ce qui est acceptable.
Des MESORE plus ou moins fragiles
Votre meilleure solution de repli détermine à quel moment vous pouvez refuser une proposition non favorable. Plus votre MESORE est solide, plus vous pouvez négocier des clauses avantageuses, en sachant que vous êtes en position de force, avec une solution acceptable si un accord ne peut pas être trouvé.
En revanche, si votre MESORE est fragile, vous serez dans une position de négociation précaire. Quand un négociateur a une faible MESORE (on n’a pas les informations en main pour la définir), il lui est difficile de refuser une proposition, même modeste. De plus, si son interlocuteur est au courant de la fragilité de sa MESORE, le négociateur voit sa marge de manœuvre terriblement réduite.
Exercice d’application : Prenez quelques minutes pour vous remémorer votre dernière situation de négociation, aviez-vous une MESORE sous le coude ? Était-elle fragile ou solide ? Pouvez-vous la quantifier ?
Connaître sa MESORE pour surveiller ses arrières
Une MESORE fragile n’est pas forcément synonyme de défaite à l’arrivée. Quelles que soient les cartes dont vous disposez, il existe heureusement 3 méthodes pour consolider votre jeu de fin négociateur :
- Booster votre MESORE
- Identifier la MESORE de l’autre partie
- Rendre vulnérable la MESORE adverse
Connaître sa MESORE pour mieux l’augmenter !
La MESORE n’est pas un objectif à atteindre mais bien une solution de repli acceptable en cas de position défavorable. Elle peut être améliorée en cultivant la non-évidence. En effet, il ne faut pas oublier les informations dont ne dispose pas votre interlocuteur. Il ne connaît pas tous les contours de votre situation pour la vente d’un site internet par exemple. Vous souhaitez vendre une prestation de site internet à un client. Vous savez que le budget d’un site est aux alentours de 4000€. Votre client a un budget de 5000€ mais estime qu’il ne mettra pas plus de 3500€ pour faire concevoir son nouveau site web. Vous pourriez renforcer votre position dans les négociations en appelant votre client pour lui dire :
« En complément de la conception de votre site, je vous propose le benchmark de la concurrence avec les mots clés associés. Pour un prix un peu plus élevé – disons 1500€ de plus – vous auriez une étude complète de vos 3 principaux concurrents sur le marché, avec les mots clés stratégiques sur lesquels vous positionner. Qu’en dites-vous ? »
En procédant de la sorte, vous pourriez augmenter votre panier d’affaires de 1500€ en plus des 3500€ que coûtera la réalisation du site web pour ce client.
Tout ce que vous pourrez faire pour améliorer votre MESORE renforcera votre pouvoir de négociation.
Exercice d’application : Prenez quelques minutes pour imaginer comment vous pourriez faire dans votre future négociation.
Si vous avez une MESORE de qualité et que vous la savez supérieure à celle de votre interlocuteur, ne vous en cachez pas : informez-le discrètement que vous êtes en position de force pour négocier.
Identifier la MESORE de l’autre partie
Quand cela est possible, connaître la MESORE de l’autre partie peut être un avantage non négligeable. Mais comment obtenir cette information sans passer pour un espion ? Ce n’est pas votre adversaire qui vous la donnera, à moins que sa MESORE soit très forte comme vu plus haut dans l’article. Alors coup de bluff ou vraie mise en garde ? Parfois, vous pourrez découvrir la MESORE de votre interlocuteur en lui posant des questions durant la négociation ou bien vous renseigner sur ces élements :
- Contacter des connaissances au sein du secteur d’activité en question
- Consulter les publications professionnelles potentiellement pertinentes
- Lire les rapports annuels
- Vous mettre dans sa position, pensez en vous mettant dans la peau de votre interlocuteur
- Chercher des antécédents de négociations similaires dans le secteur et les résultats obtenus
Si vous décelez des informations sur la MESORE de l’autre partie, cela indiquera les limites de la zone d’accord possible (ZAP) de votre interlocuteur. Mais d’autres informations sont également cruciales. Par exemple, plus vous en saurez sur les problèmes plus généraux de l’autre partie, sur son secteur d’activité, sur ses objectifs, sur les situations passées, plus vous serez à même de trouver des solutions créatives pour trouver une porte de sortie pertinente.
Rendre vulnérable la MESORE de l’autre partie
Dans certains cas, vous pouvez la fragiliser de manière directe. Prenons l’exemple d’un épisode de la série Suits où Harvey Specter, avocat associé, est chargé de défendre un commerçant contre la menace d’un promoteur immobilier. L’avocat savait que son client serait difficile à défendre devant le mastodonte qui l’affrontait. Pourtant, un vice de procédure décelé dans un dossier par l’avocat fit perdre la MESORE du promoteur immobilier.
Ce dernier perdit sa MESORE et prit peur de perdre le procès. Il se retira du dossier et le commerçant pu continuer d’exercer son activité sans encombre. L’avocat avait récolté les précieuses informations pour affaiblir la MESORE de son interlocuteur adverse, ce qui a permis à son client de sortir indemne d’un couac qui aurait pu coûter cher.
Tout ce qui affaiblira la solution de rechange de l’autre partie renforcera votre position.
Connaître sa MESORE : un concept qui nécessite équilibre, clairvoyance (et mentalisme ?)
La MESORE est un concept dont il est facile de comprendre l’essence. Cependant, sa mise en pratique est plus complexe qu’il n’y parait. Ainsi, dans la plupart des négociations, plusieurs variables rentrent en ligne de compte, dont certaines ne peuvent être quantifiées ou comparées. Cela tend à créer une MESORE vague, dont il est difficile de révéler les parfaits tenants et aboutissants. Le fin négociateur sait percevoir le vrai du faux, anticiper et faire preuve de discernement. Enfin, il doit trouver le juste équilibre entre son interprétation et celle de son interlocuteur pour connaître sa MESORE.
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