Comment construire un argumentaire de vente en « béton » ?
La capacité à convaincre un interlocuteur, quel qu’il soit, ne s’improvise pas en un claquement de doigt. Trop souvent, nous nous référons à notre seule capacité à trouver les mots justes au bon moment, à sortir la parade qui saura faire pencher la balance en notre faveur…
Cette tactique a, certes, le mérite de ne pas demander trop d’efforts de préparation. En revanche, elle est également la cause de nombreux regrets pour celui qui compte sur ses seuls talents d’orateur pour convaincre.
En effet, que ce soit pour une négociation de salaire ou un entretien de vente, le hasard n’a pas sa place pour celui qui souhaite provoquer son succès. La différence entre un vendeur amateur et un champion de la vente, vous la connaissez ? Le premier espère obtenir la signature du client, le second se la garantit…
Cap sur le monde de l’illusionnisme appliqué à la vente !
La méthode que je souhaite partager avec vous aujourd’hui, est celle d’un maître illusionniste de renom, auteur et conférencier international, qui a choisi de transposer ses secrets durement acquis par sa pratique de l’illusionnisme, aux joutes de la négociation et des mécanismes d’influence !
Il se nomme Jacques H. Paget et sa technique est extraite de son livre « Le Pouvoir de l’Illusion« . Voici sa méthode pour construire un argumentaire de vente en béton :
« Convaincre, c’est faire en sorte que quelqu’un ne cherche plus à lutter contre vos arguments mais au contraire s’y rallie. »
En effet, comme l’explique l’auteur, il serait naïf de croire que vous puissiez omettre tous les aspects négatifs de votre demande à votre contradicteur et vous concentrer uniquement sur ceux positifs à mettre en avant. Vous devez voir la négociation comme un combat à l’issu duquel ressort toujours un vainqueur et un vaincu.
« Si les deux sortent vainqueurs, c’est une association. Si les deux sortent vaincus, c’est une stupidité. »
L’auteur va même plus loin en détaillant les similitudes entre la négociation et le poker.
« Pour s’exercer à la négociation, le jeu du poker est sans doute le meilleur. »
Lorsqu’il est pratiqué selon toute les variantes possibles, il s’agit certainement du jeu le plus subtil pour perfectionner sa perception intuitive des réactions d’un interlocuteur. L’auteur n’en parle qu’à titre anecdotique ici, en nous rappelant que le monde des affaires n’est pas un jeu.
Mais alors comment s’y prendre pour exprimer vos arguments lorsque vous ne pourrez plus miser sur votre silence et qu’il vous sera demandé d’exposer vos idées ?
Connaissez-vous la technique de l’entonnoir et du siphon ?
La construction d’un argumentaire de vente « béton » passe avant tout par deux systèmes combinés dit de l’entonnoir et le siphon. C’est ce que l’on appelle la spirale inexorable.
Définissez votre objectif
Premier point fondamental, vous devez avoir clairement déterminé ce à quoi vous voulez aboutir : quel résultat ou profit escomptez-vous de votre intervention ? Lorsque vous l’aurez défini en fonction des critères qui vous sont propres, vous devrez remonter l’entonnoir de vos arguments dans un mouvement circulaire, en spirale. C’est une image bien sûr. Mais qu’il est important d’avoir en tête. Pourquoi un tel système ? Parce que vous devez construire votre cohérence. L’auteur considère qu’il existe deux types de cohérence en négociation : la cohérence relative et la cohérence absolue.
La cohérence relative
C’est la vôtre. Ce sont vos idées et elles n’ont véritablement de pertinence que pour vous. C’est votre point de vue. Il est très difficile de faire admettre son point de vue, car chacun a le sien qui est tout à fait valable à ses yeux, selon la formule : « Chacun voit midi à sa porte. »
La négociation n’est pas l’échange de points de vue.
La cohérence absolue
C’est la cohérence objective, celle sur laquelle tout le monde ne peut être que d’accord. Même si tout le monde n’y trouve pas son compte, chacun est bien obligé de l’admettre.
« Le soleil brille, donc il fait beau » est d’une cohérence absolue même pour ceux qui n’aiment pas le soleil.
Pour élaborer vos argumentaires, l’illusionniste préconise, dans un premier temps, d’établir votre cohérence relative : « Voilà ce que je pense », et dans le second de construire la cohérence absolue. Il faut remonter l’entonnoir en spiral. lorsque vous voudrez convaincre, il faudra redescendre l’entonnoir en tournant dans la spirale comme l’eau dans un siphon.
Admettons que vous vouliez, par exemple, vendre un produit nouveau en tant que commercial. C’est un exemple de base. Le mot produit peut parfaitement être remplacé par le mot idée. Peu importe, ce produit ou cette idée, étant nouveau, il ne présente aucun point de repère pour ceux qui ne le connaissent pas. Si vous voulez le vendre tel quel, vous allez droit dans le mur. Personne ne se sentira véritablement concerné.
Faites voyager votre interlocuteur
Alors comment faire me direz-vous ? Jacques H. Paget considère qu’il faut, dans un exercice de ce genre, partir d’un point extrêmement éloigné de celui auquel vous voulez arriver. Et vous y arriverez. Mais pas de précipitation. Prenons exemple sur les Asiatiques, réputés comme de très bons négociateurs, ils savent que rien ne s’obtient rapidement. Ils ont dans leur culture le sens du temps. Les Occidentaux sont beaucoup plus pressés et veulent toujours tout, tout de suite. Et n’obtiennent souvent pas grand-chose. Souvent beaucoup moins que ce qu’ils auraient pu obtenir.
Donc partez de situations parfaitement objectives, sans tomber dans les lieux communs, situations que vous pouvez étayer en pourcentages. Par exemple, « nous avons observé que 8 client sur 10 se comportent de telle manière… » L’énorme avantage du 80/20 est le suivant : si celui qui vous écoute estime qu’il se situe dans les 80, il commencera à entrer dans l’acceptation de vos arguments et considèrent que vous avez raison. Et s’il pense appartenir à la minorité, il s’apprécie davantage en trouvant qu’il n’entre pas dans le « gros du troupeau ».
Dans les deux cas, vous avez fait deux heureux qui sont désormais plus enclins à vous suivre et à vous croire. C’est également l’avantage d’une formulations telle que « Ne me demandez pas pourquoi, c’est ainsi… »
Donnez-lui du crédit
Si vous voulez qu’un adversaire vous suive, même sur les arguments qui le défavorisent, il faut en premier lieu lui montrer que l’on est conscient de sa réalité subjective. Vous devez pour cela rappeler les faits tels qu’ils sont, de la manière la plus objective possible.
Reprenons l’exemple du commercial souhaitant vendre un produit innovant à son client :
« J’observe que vous avez un budget de 900 euros » et que le prix de ce produit est de 1000 euros. Etes-vous d’accord avec cela ? » : Le client opine du chef.
« Très bien, vous savez que ce produit a un fort potentiel de marché et que son prix est parti pour croître de 20% d’ici l’année prochaine ? » : Nouvelle réponse affirmative.
Ce produit représenterait-il, pour vous, un réel avantage concurrentiel sur votre marché ? Si le client répond par l’affirmatif une nouvelle fois, vous pourrez poursuivre ainsi jusqu’au montant de la transaction en question qui viendra clôturer la négociation…
Ce qui compte, c’est d’amener l’adversaire à rentrer peu à peu dans un cercle d’adhésion progressif dont il ne pourra en sortir qu’en apparaissant de mauvaise foi puisque jusqu’à ce stade, il était parfaitement d’accord.
Pour clore cet article, il convient de signaler que ce genre de procédé peut s’avérer très puissant lorsqu’il est appliqué à des aspects émotionnels. Cela peut créer un conflit intérieur chez la personne qui subit cela. En effet, certaines sectes ont, par exemple, utilisé ce levier pour embrigader leurs interlocuteurs…
En partant de faits réels et concrets, ils obtenaient d’abord la confiance de leurs victimes avant de les piéger avec des demandes pernicieuses et manipulatrices, fragilisant ainsi leur force mentale jusqu’à créer conflit interne en eux. C’est pourquoi il est important de garder ce principe à l’esprit. Vous pourrez mieux vous en prémunir et l’appliquer avec bienveillance et tact.